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A Woman under the influence (John Cassavetes)

J'ai enfin regardé la semaine dernière (octobre 2017) ce film que j'ai acheté dans un coffret de Cassavetes il y a lurette. J'ai bien sûr souvent entendu parler des films "indépendants" de Cassavetes, tournés avec sa femme Gena Rowlands le plus souvent, mais je n'en avais jamais vu un. A Woman under (the) influence est son plus connu, et je n'avais aucune idée de quoi il s'agissait.

Il y a donc de quoi être surprise : le sujet est "lourd", puisqu'il s'agit d'une femme qui souffre d'une maladie psychiatrique que son entourage ne reconnaît pas. On la voit donc avec sa famille, ses 3 enfants et son mari, les collègues de ce dernier, sa belle-mère et sa propre mère et on ne tarde pas à se douter que quelque chose ne tourne pas rond... C'est extrêmement bien fait, et je suis heureuse que je ne connaissais rien du sujet avant de démarrer car je me suis posé très vite des questions : qu'a-t-elle cette femme pour se conduire de cette façon décalée ? Plus l'histoire avance plus il est clair que Mabel (c'est son prénom dans le film) a un grain. Mais est-elle la seule à se comporter de façon bizarre ? car le coup de génie du metteur en scène c'est de nous présenter un mari (joué par un Peter Falk égal à son personnage de Columbo) qui lui non plus n'a pas l'air tout-à-fait "normal".

Evidemment les ennuis ne peuvent que s'accumuler, même si on ne sait pas depuis quand Mabel souffre de ce disfonctionnement. Et ils conduisent (attention spoiler) à l'internement de l'héroïne lorsque vraiment ça ne va plus, après une scène de crise impressionnante aux deux tiers du film environ.

 

C'est un film marquant, sans doute à cause de la force de l'interprétation de Gena Rowlands dans le rôle de la fragile Mabel, même si à certains moments j'ai eu l'impression qu'elle en faisait trop : elle est remarquable avec ses mimiques, ses gestes brusques, ses petits bruits bizarres, et en même temps elle est merveilleusement humaine. On comprend que son mari l'aime à la folie (sans jeu de mot), au point de refuser de voir qu'elle est malade et aurait besoin d'un peu plus de soutien dans sa vie quotidienne. Mais le mari est un homme simple, un ouvrier sur un chantier, qui n'a pas les mots pour qualifier ce dont souffre sa femme : il ne veut pas entendre ses collègues dire qu'elle folle, non, elle n'est pas folle puisqu'elle s'occupe de la maison et des enfants !

Nous aurons l'occasion de voir comment en effet elle s'occupe de ses 3 enfants à leur retour de l'école : c'est émouvant et pénible à la fois, car malheureusement le monde ne marche pas comme Mabel voudrait qu'il marche.

Donc Mabel ne peut pas compter sur son mari, qui a lui aussi des réactions pour le moins inattendues (quand il invite au petit matin tous ses collègues chez lui après une nuit de travail par exemple). En plus il peut être violent, quand ses émotions le dépassent : en cela Peter Falk lui aussi est remarquable. Il nous montre un homme qui aurait lui aussi le plus grand besoin d'une "aide" pour gérer cette situation difficile. Mais non, à part faire appel au médecin de famille pour calmer Mabel quand les limites sont atteintes, il ne sait pas comment réagir. Il souffre mais ne sait absolument pas quoi faire, il est maladroit et touchant dans sa maladresse.

 

Dans l'ensemble le film fonctionne assez bien malgré sa longueur (presque trois heures je crois). Mais est-ce que l'histoire m'a convaincue ? pas réèllement. Il y a trop d'invraissemblances, je doute que dans la réalité les choses se passeraient de cette façon (l'école des enfants aurait sans doute tiré la sonnette d'alarme plus tôt). Et puis cette scène ridicule au retour de Mabel de l'hôpital psychiatrique : inviter plein de gens pour la plupart inconnus d'elle, pour "fêter" son retour : et ses parents sont d'accord ? il ne se trouve personne dans l'entourage proche pour déconseiller au mari pareille idée ?  La manière de filmer de John Cassavetes est particulière, avec beaucoup de gros plans et une caméra assez instable qui bouge beaucoup : c'est voulu puisqu'il faisait des films comme des documentaires. Mais ce n'est pas toujours agréable pour le spectateur.

Donc il me reste maintenant à regarder d'autres de ses films, pour confirmer ou infirmer cette première impression : je ne suis pas fan.



16/10/2017
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