Rhode au jour le jour

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la crise, les migrants, la COP 21... et le reste !

(article commencé en novembre mais pas posté : après relecture je trouve qu'il peut l'être. Entretemps il y a eu les attentats du 13 novembre qui ne simplifient pas la donne, hélas, et le résultat positif de la COP21)

 

Ca fait un petit moment que je n'ai rien écrit, et pourtant les sujets d'actualité ne manquent pas depuis cet été avec l'afflux de migrants qui font "craquer" l'Europe (au moins symboliquement).

Et puis ce matin à la radio un intervenant qui déclare un peu brutalement à propos de la COP 21 qui peine à susciter l'enthousiasme : "ce qui est en jeu mais on ne le dit pas, c'est la baisse de notre niveau de vie  en Occident".

Et là, tout s'est mis en place dans ma tête, alors que je cherchais depuis plusieurs mois comment tout était lié : l'environnement et le réchauffement climatique, l'accroissement des inégalités de revenus, l'essoufflement des démocraties, les migrations internationales...

En fait, quand on y réflechit un peu, nous avons assis nos démocraties en "achetant" la paix sociale depuis 1945 : profitant d'une croissance jamais atteinte auparavant, les pays d'Europe ont pu répartir les bénéfices de cette croissance par des politiques de redistribution, qui ont empêché les partis d'extrême-gauche comme d'extrême-droite d'accéder au pouvoir. Tant que les catégories les moins favorisées voyaient leur niveau de vie s'améliorer d'année en année, avec la promesse de gagner (et consommer) toujours plus, les partis communistes occidentaux ont certes engrangé des succès politiques notables, mais ne sont pas parvenus à déclencher le grand soir. Pourquoi en effet courir les risques liés à une révolution, quand les ventres sont rassasiés (pour le plus grand nombre s'entend) et que chaque foyer peut espérer s'offrir une voiture, un réfrigérateur, une télévision etc. ?

C'est ainsi que nos pays ont fonctionné pendant la seconde moitié du 20ème siècle, sans se préoccuper des dégâts que cette croissance et ce consumérisme à tout va engendraient pour la planète et sans trop se soucier du reste du monde. Tant que Billancourt se tenait tranquille !

 

Cette belle illusion a fondu comme la glace au Pôle Nord : parce que les limites de notre planète sont désormais évidentes pour tous ; et parce que suite aux transformations technologiques et à la "globalisation" qui a suivi, beaucoup d'autres pays réclament eux aussi une part du gâteau, un accès aux ressources naturelles de la planète, et cherchent bien sûr eux aussi à satisfaire les aspirations de leurs populations ... Et on peut même penser qu'un pays dictatorial comme la Chine a encore plus de raisons que nous de vouloir appaiser sa population par des cadeaux consuméristes, puisque aucun autre échappatoire ne lui est proposé (pas de liberté politique).

 

C'est donc la quadrature du cercle : tous les pays veulent conserver ce qu'ils ont ou obtenir plus, alors que notre monde est fini et que le réchauffement climatique menace l'agriculture dans de très nombreuses zones. D'où les discours complètement décalés que tiennent la plupart des hommes politiques en Occident : personne n'ose jamais dire ce que disait l'auditeur ce matin, à savoir qu'on ne s'en sortira pas sans une baisse de notre niveau de vie : moins de déplacements, de voyages, de vacances (horreur !), moins de chauffage, moins de bouffe, moins de viande, et que sais-je encore.

C'est tout notre modèle économique basé sur la technique, depuis en fait l'invention de la machine à vapeur, qui est à ré-inventer. Mais comment expliquer cela à ceux, dans nos pays, qui sont restés à la marge de cette société de consommation ? qui ont de la peine à finir le mois ? qui ne partent jamais en vacances ? Et dont le seul espoir est un jour d'y parvenir ?

 

La paix sociale, le consensus de base de nos pays démocratiques que nous tenons pour des acquis définitifs risquent de voler en éclat : on le voit avec le succès sans précédent de tous les partis "populistes" qui refusent de jouer le jeu. Ces partis se font la voix des mécontents, des laissés pour compte qui n'ont nullement l'intention de s'imposer des sacrifices supplémentaires.

Pendant ce temps les décisions urgentes qui DOIVENT être prises très rapidement concernant la planète, sont remisées aux calendes... grecques (note au 14/01/2016 : la COP21 a accouché d'un accord de principe dont il faudra suivre de très près la mise en oeuvre). Nous voici au pied du mur : il faudrait pouvoir dire à tous nos concitoyens que notre modèle est obsolète, voire nuisible, et qu'il ne sera jamais à la portée de l'ENSEMBLE de la population, à l'intérieur de nos pays dits riches, sans remettre en cause les aspirations tout aussi légitimes des populations asiatiques ou africaines qui commencent à sortir de l'extrême dénuement. Et pour être crédibles, les pays occidentaux doivent commencer par donner l'exemple en amorçant le "moins" consommer.

Ce qui revient à "désespérer Billancourt"... alors que les inégalités de revenus ont explosé ces dernières années !

 

Qui va le faire, qui osera briser le tabou ? les partis politiques au pouvoir ont plutôt tendance à cacher cette réalité désagréable sous de belles déclarations, de peur de mettre le feu aux poudres. D'où le sentiment que la parole politique est déconnectée de la réalité, que les gens perçoivent finalement assez bien au fond d'eux-mêmes.

La venue de réfugiés de Syrie et d'Irak fuyant la guerre et les massacres en grand nombre a fait irruption dans notre confort feutré. C'est une première manifestation très concrète de cet aspect "fini" au sens de limité de notre planète. Ils ont envie de ce que nous avons : la sécurité, mais aussi des routes, des hôpitaux, des écoles. Avec l'eau courante et l'électricité, la télévision à écran plat et un smartphone. Mais nous ne pourrons pas leur permettre de les acquérir, sans renoncer nous-mêmes à un peu de "surplus" : est-il nécessaire d'aller en vacances aux sports d'hiver chaque année, pour les catégories les plus favorisées ? est-ce que partir en croisière Costa à 500 euros la semaine tout compris est un droit pour tous ? est-ce que les jeunes doivent prendre l'avion pour franchir les océans aussi facilement que nous prenions le car ou le train il y a trente ans ? Non bien sûr, et nous vivrions tout aussi bien sans le faire. Mais il est toujours beaucoup plus difficile de faire avec moins, que l'inverse. Cela crée des frustrations compréhensibles, mais pas justifiées.

Et par ailleurs, de nombreux secteurs d'activité économique (donc des emplois) reposent sur ces modes de vie : les loisirs, les voyages à bas coût, les vacances. Ces secteurs ne sont pas du tout prêts à se saborder au nom de l'avenir de la planète ! On en revient donc à la politique et aux choix difficiles qui sont proposés à nos dirigeants. Tout se tient.

 



14/01/2016
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