Rhode au jour le jour

Je viens d'accompagner Zina à la gare du Nord, elle a passé 3 jours ici et moi j'y étais partie vendredi dernier. J'ai trouvé absolument nécessaire d'écrire mes réactions, même à chaud, dans un long mail à Esther que je vais peut-être recopier ici. Car je suis très préoccupée, un peu perturbée, et aussi très fatiguée après cette semaine passée en sa compagnie.

Zina n'est pas une personne facile à aider, pas non plus une personne facile à aimer avec sa désinvolture, sa fierté mal placée et son manque de sens des réalités, mais elle a un bon coeur et surtout ce qu'elle traverse comme épreuves est inhumain. Comment réagirais-je moi, placée dans les mêmes circonstances ? il faut essayer de rester modéré dans son jugement. Moi j'ai tendance à trop vite catégoriser les gens, mais il n'en reste pas moins que je sens au plus profond qu'elle est pour beaucoup ? pour un peu ? dans son malheur.

Impossible à dire à Zina bien sûr. Et je n'en suis mêmes pas sûre. Et de plus, suis-je vraiment si "supérieure" dans mes choix de vie et d'attitude ? Quelque part je crois que rien n'arrive non plus totalement par hasard. Est-ce trop présomptueux d'écrire cela ? est-ce que ça voudrait dire que moi je suis à l'abri d'errements semblables ? qui me permet de l'affirmer ?

Comment faire face au malheur quand il vous frappe ? comment éviter qu'il vous frappe ? est-ce que Zina aurait pu éviter le suicide de son fils, en l'élevant différemment par exemple ? C'est possible, mais je ne peux pas lui imputer la maladie de son mari, qui a dû beaucoup faire pour fragiliser le fils...

Je me débats avec toutes ces questions, partagée entre l'irritation vis-à-vis de Zina qui ne se laisse pas facilement conseiller ou aider, empêchée comme elle l'est par son orgueil, et aussi la pitié : elle n'a pas de chance, pas d'argent, je me sens donc "coupable" de ce que j'ai moi. Mais ça ne m'aide pas pour lui venir en aide ! Et cette injustice flagrante entre sa situation et la mienne me gêne terriblement.