Rhode au jour le jour

Je trouve que les musulmans que j'ai entendu s'exprimer à la radio hier et aujourd'hui restent dans une ambiguité totale : c'est trop facile de dire "ce sont des monstres et des gangsters qui n'ont rien à voir avec l'islam et avec nous, musulmans de France". Ou de faire le parallèle avec le Norvégien Breivik comme j'ai entendu. Que je sache, Breivik était seul et a agi seul, il n'a pas des milliers de gens derrière lui dans plusieurs pays du monde, il n'a pas fait d'émules et nul jeune ne part s'embrigader pour continuer à mener son combat.

Bien sûr je souhaite que les musulmans de France et d'Europe fassent entendre leur indignation et leur refus de cette dérive mafieuse, sectaire et sanguinaire. Je les attends nombreux dans les cortèges pour crier "nous sommes tous des cochons de Français" (mais j'ai peur d'être déçue).

Ceci dit, les musulmans ne feront pas l'économie d'un débat bien plus profond, qui va jusqu'à une remise en cause radicale des fondements de leur pensée. Car enfin, ce n'est pas un hasard si ce sont justement des groupuscules musulmans qui se sont lancés dans l'aventure du Califat ! ce n'est pas par hasard que quelque part en Algérie un groupe d'hommes voulant démonter leur allégeance au calife a enlevé un "cochon de Français" et l'a exécuté.

Ce sont bien des musulmans qui rejettent les valeurs de l'occident, ici, là et ailleurs. C'est un choix et ils ont bien le droit (dans leurs pays, en Egypte, en Tunisie, en Arabie Saoudite) de choisir de regarder vers le passé quand le reste de la planète évolue. Comme Boko Haram qui veut empêcher les filles d'aller à l'école.

Mais les autres musulmans, ceux qui envoient leurs filles à l'école, doivent voir qu'il y a une continuité terrible entre voiler les filles, refuser de serrer la main aux femmes, et finalement les horreurs auxquelles on assiste maintenant en Syrie et en Irak. Il y a une pente savoneuse, une logique, bref posez-vous la question vous musulmans de France : pourquoi eux ? pourquoi là-bas ? Et sentez-vous responsables ! Un jour il vous faudra choisir un camp, et clairement. Le temps des arrangements faciles est révolu.

Tahar Ben-Jelloul l'a parfaitement résumé hier matin sur France Inter : c'est à l'aune du traitement réservé aux femmes qu'on pourra établir si tel ou tel régime est civilisé ou pas. J'ai envie de dire : pas seulement les régimes, mais les individus eux-mêmes.  Et j'aurais envie d'ajouter au traitement des femmes, la liberté d'opinion et de religion. Et c'est bien là qu'on mesure le chemin immense qu'il reste à parcourir.