Rhode au jour le jour

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Sunset Bvd (Billy Wilder)

J'ai regardé l'autre jour ce film que Bertrand m'a offert récemment (pour mon anniversaire) et que je n'avais encore jamais vu, honte à moi ! Même pas un court extrait, une scène, rien de rien. Je savais qu'il y avait une scène fameuse avec un escalier, c'est tout.

 

C'est vraiment un chef-d'oeuvre, je le dis sans hésitation. Dommage que Papa n'en ait jamais parlé : j'aurais aimé connaître son avis. D'abord il est filmé en noir et blanc, et avec une voix off, ce qui lui donne un petit air de film noir de ces années là (1950).

Ensuite c'est bien sûr une histoire très forte, celle de la star déchue qui vit cloîtrée en attendant son come-back et se leurre sur sa célébrité. Bien aidée en cela par le personnage du butler (joué par Erich Von Stroheim) qui maintient la star dans ses illusions.

La star déchue c'est Gloria Swanson, elle-même star au temps du muet (elle était un peu plus vieille que Greta Garbo et n'a pas résisté à l'arrivée du parlant). En fait je ne pense pas avoir jamais vu de film d'elle, et si je connaissais son nom c'est à cause de Sunset Boulevard, qui lui a apporté la vraie célébrité je pense. Elle avait cinquante ans à l'époque du tournage.

 

Le "gigolo" c'est William Holden, très séduisant. On comprend très bien comment il se laisse prendre dans un engrenage fatal : ce n'était pas son intention de se faire entretenir par cette femme riche et plus âgée, mais il n'a plus trop de principes et en plus il a les créanciers aux trousses (ce qui est un motif puissant). Au début Norma Desmond (le nom de la star) revit et retrouve une certaine jeunesse grâce à cet "amour". Leur tort à tous, y compris Cecil B. de Mille qui joue son propre rôle de metteur en scène (extraordinaire d'avoir pu le convaincre de participer lui-même) c'est de ne pas oser dire à Norma qu'elle s'illusionne : les hommes autour d'elle sont tous trop lâches pour le faire (on comprend plus tard que le "butler" a d'autres raisons personnelles).

Du coup elle glisse lentement mais sûrement vers la folie, jusqu'à la scène finale de l'escalier : quelle trouvaille ! Ce film est rempli de trouvailles géniales du metteur en scène, et je suis persuadée que j'en découvrirai d'autres en le regardant une seconde fois.

 

Que dire de plus ? ah bien sûr, les performances des acteurs : Gloria Swanson est électrifiante, je ne trouve pas de mots pour la décrire. Elle fait peur, elle émeut, elle horripile, elle est extraordinaire !!! Tous les autres sont convaincants, sauf peut-être la jeune fille jouée par Nancy Olson : je n'avais jamais entendu parler de cette actrice, très jolie évidemment, mais j'ai trouvé son personnage falot et convenu. Et puis il n'y avait guère besoin de cette histoire d'amour qui ne sert qu'à déclencher la jalousie maladive de Norma.

Le décor dans lequel se déroule l'histoire, la demeure de Norma Desmond, est un pièce d'anthologie à lui tout seul : je crois me souvenir que les intérieurs avaient été reconstitués en studio, tandis que l'extérieur était bien celui d'une ancienne belle maison qui depuis a été détruite (dommage). Tout a été imaginé pour recréer un genre de maison-fantôme, dans laquelle plus personne ne met le pied, jusqu'à ce que William Holden s'y fourvoie par hasard.

 

Encore un commentaire : j'y ai surtout vu une dénonciation du sort réservé aux actrices vieillissantes par Hollywood (et je crois que pas grand-chose n'a changé depuis 1950 à ce sujet). C'est le drame de la vieillesse que le personnage de Norma Desmond rend sensible, dramatique, je cherche encore un adjectif approprié qui m'échappe : pathétique... Elle est vulnérable parce qu'elle n'a plus vingt ni même trente ans. Et cela, toutes les femmes le reconnaissent : c'est terrible. Il faut savoir vivre avec car le vieillissement est inéluctable (ou alors il faut mourir jeune comme Marilyn Monroe, ou disparaître de la circulation comme Greta Garbo peut-être d'ailleurs pour cette même raison ?). Je n'y ai pas vu une critique de Hollywood en général : au contraire, lors de la scène où Norma revient faire une visite aux studios, tout le monde est plutôt d'une grande gentillesse avec elle. Mais les jeunes l'ont oubliée, c'est de toutes les époques. Personne n'a jamais prétendu qu'il était agréable de vieillir. Mais dans un métier où le physique et le pouvoir de séduction sont les armes principales, c'est évidemment encore plus difficile que partout ailleurs.

Ce qui m'oblige à ajouter que je tire mon chapeau aux metteurs en scène et producteurs qui parient sur des actrices comme Helen Mirren et Meryl Streep de nos jours : ils savent qu'elles ont encore de quoi nous étonner, et c'est tant mieux !

PS : le DVD contient un bonus très intéressant du "making of", avec plein d'anecdotes : à ne pas manquer !



02/11/2019
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