Idomeneo (Mozart) à Amsterdam
Je voudrais écrire quelque chose sur Idomeneo, l'opéra de Mozart que j'ai vu en février 2025 au Muziektheater d'Amsterdam, avant que mes souvenirs s'estompent : c'est la première fois que j'assistais à une représentation de cet opéra, dont j'avais pourtant le CD (un cadeau de 1988 des parents !) et même un DVD (offert par Suzanne je crois). Je le connaissais en fait très mal, à part quelques airs des choeurs que j'avais chantés à l'époque quand nous habitions Boulogne-Billancourt.
C'est un opéra composé par Mozart à 25 ans, avant la grande époque des opéras avec Lorenzo da Ponte, mais ce n'est plus un opéra de jeunesse. J'ai lu quelque part que c'est l'opéra de la transition, entre ce qui se faisait avant Mozart dans le genre de l'opera seria, et les chefs-d'oeuvre à venir. On peut déjà percevoir dans certains airs des avant-goûts de Cosi fan Tutte, et même de Don Giovanni.
Tout d'abord il faut dire que la mise en scène était comme d'habitude ridicule : pas franchement laide (toutes ces cordes rouges tendues sur la scène) mais la présence des nombreux danseurs qui n'avaient strictement rien à faire là, était plus que gênante. Mais voilà : le metteur en scène est chorégraphe, il lui fallait faire intervenir sa troupe... Pour le reste décor presque inexistant (remplacé par les cordes !) et costumes de fantaisie : pas vraiment gênant mais pas ce que je préfère non plus. Esthétiquement ce n'était pas moche du tout : ce sont des Japonaises qui étaient à l'oeuvre et ça se voyait.
L'autre reproche, plus grave, à faire à ce metteur en scène à l'ego démesuré comme ils ont tous de nos jours, c'est d'avoir décidé dans sa grande sagesse, de modifier radicalement la fin de l'histoire : au lieu du "happy end" célébré par le texte du livret ET la musique de Mozart, le personnage titre tue son fils et sa belle-fille car, toujours selon la lecture du metteur en scène, il refuse d'abiquer comme le prévoit le livret. C'est un contresens particulièrement malvenu car la musique est allègre : tout le monde se réjouit de l'union d'Idamante et Ilia ! Et surtout, rien mais absolument rien dans toute l'action qui précède ne laisse annoncer que Idomeneo est tellement jaloux de son trône et de son pouvoir qu'il est prêt à immoler son fils. Justement tout l'opéra est une tentative pour éviter à son fils d'être sacrifié à Neptune !
Le public vient voir Idomeneo de Mozart, par Idomeneo selon Sidi Larbi Cherkaoui que tout le monde aura oublié à sa mort !!! Rien à faire, ces excès en tout genre me rendent furieuse à chaque fois.
Mais parlons de la musique, car elle est belle, et je suis parvenue à "bloquer" les danseurs de mon champ visuel pour me concentrer uniquement sur les chanteurs. Je m'étais bien préparée, car ne connaissant que très vaguement l'opéra je ne savais pas quels en étaient les beaux airs. Du coup j'ai vraiment bien tout savouré.
Le second acte est le plus intéressant pour l'action, mais le troisième comprend trois airs splendides qui se suivent : un air absolument charmant d'Ilia amoureuse, un sublime duo entre elle et Idamante, et enfin un quatuor impressionnant (le premier du genre !) avec les 4 personnages principaux. Mon seul regret est que la mise en scène ait préféré une mezzo-soprano pour chanter Ilia (rôle masculin) au lieu d'un ténor, ce qui a aussi été prévu par Mozart : la crédibilité y perd beaucoup. Il y a trop de voix féminines proches (Ilia, Idamante et Elettra) remarquait un critique. Bien sûr si Idamante est chanté par un ténor, ça fait trois ténors dans l'opéra, Idomeneo, Arbace et Idamante : peut-être pas idéal non plus même si j'adore les airs pour ténor de Mozart.
J'ai énormément aimé le soprano clair et léger d'Anna El-Khashem en Ilia : elle était parfaite pour incarner une jeune fille amoureuse mais déchirée entre amour et devoir.
Le Idamante de Cecilia Molinari (pas connue de moi) était à la hauteur, sans plus. Elettra était chantée par Jacquelyn Wagner qui a été très applaudie : moi je trouvais sa voir un peu trop criarde.
Idomeneo était chanté par le seul chanteur que je connaissais : Daniel Behle (mon CD des airs de Gluck !), qui était parfait pour montrer un roi accablé par son destin et sa promesse, plutôt victime des événements que noble héros. Arbace, un autre ténor, était chanté par un jeune chanteur néerlandais qui s'en est très bien sorti même s'il n'avait pas vraiment l'âge du rôle.
L'orchestre (Nederlands Kamerorkest) dirigé par Laurence Cummings a été très appaludi également : ses tempis enlevés étaient très à mon goût, et les instruments sonnaient très clairs.
En résumé : c'était une soirée réussie malgré les inventions du metteur en scène, je me suis régalée avec la musique.
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