Rhode au jour le jour

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La Passion de Dodin Bouffant (Anh Hung Tran)

Je reviens donc sur ce beau film que nous avons vu récemment avec Suzanne à Amsterdam, le lendemain de Noël pour être précis. Avec Juliette Binoche toujours formidable et Benoît Magimel (j'ai appris à cette occasion qu'ils avaient été en couple dans les années 2000 et ont une fille ensemble).

C'est un film étonnant : très lent, avec pratiquement pas d'histoire. Il y a d'ailleurs eu une personne qui a quitté la salle à mi-film, sans doute déroutée par la lenteur.
Mais c'est un film esthétiquement magnifique ! Tout a été pensé avec soin pour recréer un décor et une atmostphère un peu nostalgiques d'une époque révolue. On pense souvent à des tableaux impressionnistes devant certaines scènes fimées dehors avec une belle lumière, ou au contraire dans la maison. Il n'y a pas de musique, sauf à la fin pour le générique, mais il y a des bruits : celui des oiseaux dans la cour, du beurre en train de frémir, et tant d'autres qui donnent vraiment l 'impression d'avoir été enregistrés en direct. Il y manquait juste les odeurs, car on aurait aimé pouvoir sentir ce qui se cuisinait et qui avait l'air tellement appétissant...


Evidemment le spectateur d'aujourd'hui est un peu perdu, tellement les "recettes" exécutées sous nos yeux sont compliquées et tellement les repas sont copieux : comment pouvait-on manger autant ? nous en sommes incapables aujourd'hui. Et les protagonistes (le gastronome et ses amis surtout) nous semblent un peu anachroniques, préoccupés comme ils le sont par le bien manger (et bien boire !).
Aucune référence au contexte historique ou polique : le film se déroule dans un vide absolu, seule compte la bonne cuisine qui est préparée sous nos yeux.
Et à ce sujet, le film a quelque chose de sensuel dans la manière dont il montre les mains en action (et en gros plan) pétrissant la matière première et enchaînant les gestes nécessaires à la réalisation de ces mêts compliqués. Ce côté documentaire, purement descriptif, m'a beaucoup séduite. J'en suis venue à regretter que tout ce savoir se soit progressivement perdu : qui mange encore des ortolans avec sa serviette sur la tête ? La cuisinière hors pair incarnée par Juliette Binoche est certainement une exception, et seuls un petit nombre de gens fortunés pouvait se permettre de déguster une cuisine aussi raffinée. Mais où trouve-t-on encore de nos jours des gens capables de faire la même chose ? C'était une époque où faire la cuisine avait encore un sens, et pas celui de déconstruire une expérience gustative.

 

Nous avons passé un excellent moment malgré la lenteur et la longueur du film (qui aurait pu faire vingt minutes de moins c'est vrai). Une gageure de nos jours, bravo au metteur en scène et aux producteurs qui ont cru en son projet !



10/01/2024
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